DefTech. Le SOFINS a bien lieu cette année. Comment s’est passée l’année qui vient de s’écouler pour le Cercle de l’Arbalète, dans un contexte compliqué de crise sanitaire ?
Benoît de Saint-Sernin. Effectivement, cela été compliqué, car nous avons l’habitude d’organiser des ateliers recherche et développement en présentiel, mais aussi des évènements les années durant lesquelles il n’y a pas de SOFINS. En revanche, nous avons pu proposer des ateliers R&D en format numérique, durant lesquels nous avons présenté des solutions devant des unités qui étaient connectées et ont donc pu bénéficier du travail de R&D que nous avions réalisé.
Mais le grand sujet était bien de savoir à quelle date nous aurions pu organiser le SOFINS. J’ai longtemps pensé que ce serait possible en mars 2021. Mais, finalement, le SOFINS ouvre le « théâtre » de la reprise économique puisque nous sommes le premier salon qui rouvre. Le Cercle de l’Arbalète est bien à sa place en ouvrant ce « théâtre » de la reprise économique. Ainsi, la fin de l’année 2020 et le début de l’année 2021 ont été entièrement consacrés à la préparation dans un contexte d’incertitude. Pour autant, nous étions persuadés que nous pourrions tenir le SOFINS en mars, en juin ou en novembre. En novembre, cela aurait été très difficile, car le gouvernement se prépare à agir en fonction de ce qui va se passer cet été. Fin juin-début juillet est finalement une période beaucoup moins risquée que novembre. Nous sommes très heureux d’avoir maintenu le cap de juin. Les exposants également, car ils vont pouvoir retrouver leurs clients et leurs partenaires. Ce sera une très belle édition qui, rappelons-le, est réservée aux professionnels.
Y a-t-il des tendances qui se dégagent depuis un an et qui seront présentes au SOFINS 2021 ?
Deux grandes tendances se dégagent très clairement. La première concerne les drones et leurs multiples usages. Jusqu’à aujourd’hui, le drone était plutôt cantonné à la production d’images, mais on se rend compte qu’il peut embarquer bien plus qu’une caméra et apporter un autre appui aux forces au sol (éclairage, laser, interception, écoute, etc.). Il y a un vrai travail de fond sur tout ce que les drones peuvent faire, comme le portage de sacs dans le cadre de l’allègement du combattant. Lors du SOFINS, on pourra assister à une démonstration spectaculaire d’un drone-brancard volant pour l’évacuation des blessés vers l’arrière.
La deuxième tendance concerne le traitement des données de plus en plus denses. Le traitement de ces données et les renseignements qu’elles fournissent sont des éléments capitaux.
Pouvez-vous nous parler du démonstrateur FS, qui est une nouveauté cette année ?
Le démonstrateur s’appelle dorénavant le SOFTECH et le concept est tout à fait exceptionnel. Il s’agit d’un film d’animation prospectif sur les futurs équipements des forces spéciales. Le schéma du SOFTECH était le suivant : demander aux membres du Cercle d’imaginer et de proposer aux forces spéciales les équipements pour les années 2030-2035. Point important, nous n’avons pas travaillé le futurisme, mais la prospective, c’est-à-dire la possibilité que demain les forces spéciales utilisent tel ou tel matériel. Il s’agit donc d’un dessin animé sur une opération spéciale dont le scénario a été coécrit par l’état-major du Commandement des opérations spéciales (COS) et le Cercle de l’Arbalète, qui présente des matériels qui n’existent pas encore. C’est un élément très important pour faire réfléchir les opérateurs des forces spéciales. Prenons un exemple : le film présente un parachutiste sautant d’un avion avec sa caisse de matériel. Habituellement, la caisse est portée par l’opérateur. Là, elle est parachutée de manière indépendante et dispose d’un robot qui la guide pour l’atterrissage. Le parachutiste et sa caisse se posent ensemble sans aucun danger. Cette innovation n’est en soi pas spectaculaire, mais peut-être que dans 5 ou 10 ans, elle modifiera en profondeur le saut de l’opérateur, car on pourra alors parachuter des colis qui se poseront exactement là où l’opérateur le souhaitera.
Le film sera projeté dans une salle de cinéma attenante où les spectateurs verront ces technologies proposées par 18 membres du Cercle et qui touchent tout le spectre d’une opération spéciale, du renseignement à l’entraînement de manière virtuelle en passant par l’opération elle-même.
Nous avons déjà deux futurs usages. Le ministère des Armées nous sollicite pour un salon en novembre, le FID (Forum innovation défense). Il y aura également, en novembre 2022, une grande exposition sur les 30 ans de l’état-major du COS. Une salle sera consacrée au SOFTECH.
Les médias parlent souvent des forces spéciales américaines, russes ou britanniques. Où se situe la France dans le domaine des solutions innovantes pour ses forces spéciales ?
La réponse est très simple et elle me vient des Américains qui m’ont indiqué qu’ils venaient au SOFINS parce que nous sommes plus innovants qu’eux. Ils ont ajouté que si les États-Unis étaient riches, ils étaient par ailleurs moins innovants que la France. En réalité, le succès du nombre de délégations étrangères au SOFINS repose exactement sur ce constat : notre innovation, notre manière de penser ces choses nous placent en pointe. Ainsi, les forces spéciales des pays étrangers veulent bénéficier des innovations créées pour les forces spéciales françaises. Après quatre éditions du SOFINS et bientôt cinq, on peut dire que le cœur de ce salon est bien là : les autres viennent voir nos innovations et veulent la même chose. Tout repose là-dessus.
Ce qui caractérise le SOFINS, c’est la possibilité de tester tout ce que vous voyez exposé (tir, drones, véhicules, etc.). Ce salon est aussi un laboratoire in situ et c’est cela qui attire les délégations étrangères. Il y a une innovation française, une créativité française et les délégations étrangères veulent le voir et le tester pour les besoins de leurs forces spéciales.
Photo ci-dessus : © Cercle de l’Arbalète